Avant-propos – Éditorial
“Nous nous sommes tant aimés”
Par Santiago Mendieta, directeur de la publication
Après douze saisons de publication, Gibraltar a décidé de faire une pause. Sera-t-elle définitive ou temporaire ? Le temps décidera.
À nos lectrices et lecteurs fidèles et passionnés qui nous prodiguent à chaque parution encouragements et louanges, nous devons la vérité. Comme toute aventure humaine, éditer une revue papier telle que Gibraltar est un défi et l’édifice d’une grande fragilité. Hausse du prix du papier, baisse des ventes en librairie et du marché des revues ou mooks (terme marketing que nous n’avons jamais fait nôtre), difficultés à surprendre un lectorat par ailleurs très sollicité, à convaincre des libraires surchargés de nouveautés éditoriales de nous mettre en avant… Les raisons sont multiples et une certaine lassitude bien compréhensible s’est emparée de l’équipe rédactionnelle, d’autant que la revue ne nous fait que partiellement vivre. Le journalisme et l’édition, lorsqu’ils riment avec liberté et indépendance, demeurent plus que jamais des secteurs où la précarité est la règle. Nous ne plaignons pas, nous avons choisi notre sort.
Regardons en arrière. Depuis fin 2012 et le premier numéro de Gibraltar, que de chemin parcouru ensemble ! Nous avons, en douze numéros et autant de saisons, publié plus de deux cents récits et reportages de grande qualité, textes, récits photo, récits dessinés, qui évoquent le kaléidoscope des mondes méditerranéens dans toute leur singularité et complexité. Des récits qui durent afin de révéler une autre forme de réel, loin du diktat de l’actualité, par des sujets journalistiques ou de la fiction. Et nous espérons que ces histoires vous ont procuré plaisir, surprise, empathie… Surprendre le lecteur est aussi notre but.
Le part pris humaniste de la revue sur des thématiques de migration, d’écologie ou d’ouverture aux autres demeure plus que jamais, mais la montée de l’intolérance, du déni face au défi climatique, le refus de la paix, peut parfois faire douter les esprits même les plus ouverts.
Le dossier de ce nouvel opus est consacré au cinéma tant il est vrai qu’il agit comme un miroir, révélateur du monde qui nous entoure avec son pouvoir guérisseur et émotionnel hors du commun. Le Bassin méditerranéen est en outre un grand réservoir de cinéastes de grand talent qui documentent les époques passées et notre époque actuelle, les sociétés méditerranéennes avec leurs blocages ou leurs tares. Les autres sujets ici publiés que nous vous laissons découvrir sont dans la veine de Gibraltar, mus par la curiosité, une forme de résistance, la recherche de la beauté, même lorsque la marche du monde nous pousse à désespérer.
Merci pour votre fidélité.