Septembre 2020, l’armée de l’Azerbaïdjan, soutenue militairement par la Turquie, attaque le Haut-Karabakh, enclave en pays azéri essentiellement peuplée d’Arméniens. Dans ce nouveau conflit, près de 8 000 soldats perdent la vie, dont plus de 4 000 Arméniens. Les deux nations déplorent des dizaines de milliers de blessés et de disparus. À l’issue du cessez-le-feu de novembre 2020, sous l’égide de la Russie, l’Arménie doit céder à l’Azerbaïdjan plusieurs territoires du Haut-Karabakh. La population demeure traumatisée par la disparition de ses soldats et l’amertume de la défaite. Quant aux survivants, beaucoup d’appelés et de jeunes gens âgés d’à peine un vingtaine d’année, parmi lesquels bon nombre de mutilés, handicapés à vie, victimes de syndromes post-traumatiques, ils cherchent à se reconstruire et à retrouver le goût de vivre.
La nuit a revêtu sa robe d’étoiles. Depuis le tarmac de Parakar, j’aperçois l’aéroport de Zvartnots. Quelques notes de duduk s’échappent du taxi, dont la banquette sent la cigarette. Sur fond bleu marine, la Lada dévore les kilomètres qui nous séparent de la capitale, Erevan. Le chauffeur m’adresse un sourire dans le rétroviseur. Je ne parle pas encore l’arménien et encore moins le russe. L’anglais et l’espagnol ne me servent à rien, le français non plus. Alors, je me réfugie dans mon journal de bord et redécouvre avec plaisir quelques vers du poète Hovhannès Tumanyan, dont le portrait figure sur les billets de 5 000 drams :
“La route est sombre, la route est noire,
Ténébreuse est la nuit.
Immense, infinie,
Et nous grimpons vers les sommets,
Dans les rudes montagnes,
Montagnes d’Arménie.”
La suite est à lire dans Gibraltar Numéro 11